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LE FLORILÈGE DES PROMESSES TRAHIES
LE CRAPOUILLOT -N°93-avril 1987- pages 7 à 11-
Recueilli par Sivéra

Boniments et reniements
par André FIGUÊRAS

SANS doute les paroles volent-elles, mais il est tout de même possible de leur donner la chasse, comme aux papillons, et de les épingler alors sur les cartons de l'Histoire.

Entomologie, du reste, à la fois mélancolique et cruelle. Il est difficile de ne pas s'effarer en présence de contradictions qui laissent des traînées sanglantes derrière elles, et l'on se demande, à voir comment certains personnages ont pour ainsi dire retourné leur âme, si, pour étudier leur cas, il ne faudrait point, plutôt qu'un dictionnaire des girouettes, un manuel d'apostasie.

S'agissant de l'Algérie, avant les premiers crimes de la Toussaint rouge, l'idée que son destin français pût être mis en question rencontrait (sauf chez les communistes sans doute qui pourtant n'en osaient rien dire) un refus unanime.

En 1947, par exemple, le général De Gaulle clamait à Boufarik :

« La France, quoi qu'il arrive, n'abandonnera pas l'Algérie. Cela signifie que nous ne devons laisser mettre en question sous aucune forme, ni au-dedans, ni au-dehors, le fait que l'Algérie est de notre domaine. »

Edouard Depreux , ministre socialiste de l'Intérieur, répondait en écho :

« Nous réagirons avec une indomptable énergie contre toute velléité d'indépendance ou d'autonomie en Algérie. »

Lorsque, la guerre d'Indochine à peine achevée sur le désastre de Diên Biên Phû, l'insurrection algérienne prend son essor, le 1er novembre 1954, avec l'assassinat du ménage d'instituteurs Monnerot dans les gorges de Tighanimine , au coeur de l'Aurès, Pierre Mendès France, président du Conseil, déclare dès le lendemain à la tribune de la Chambre :

« Les départements d'Algérie constituent une partie de la République française. Ils sont français depuis longtemps, et d'une manière irrévocable... Jamais la France, aucun gouvernement, aucun parlement français, ne cédera sur ce principe fondamental. »

Quelques jours après, le 10 novembre, toujours à l'Assemblée nationale, son ministre de l'Intérieur, François Mitterrand , est tout aussi catégorique :

« L'Algérie est partie intégrante de la nation française. »

Propos complétés, le 12, par cette affirmation :

« L'Algérie, c'est la France. Et qui d'entre vous hésiterait à employer tous les moyens pour préserver la France ? »

LA SEULE SOLUTION

Malgré ces déclarations, il est certain que le nouveau gouverneur général, Jacques Soustelle - gaulliste et homme, de gauche - part rejoindre son poste, le 25 janvier 1955, avec des idées préconçues, qui sont loin d'être aussi fermes, mais qui ne tarderont pas à changer en présence des faits. En particulier, des émeutes dans le constantinois et, sur l'ensemble du territoire, d'une situation suffisamment agitée pour que l'état d'urgence soit proclamé.

Toutefois, Paris ne change pas de ton. Au cours du débat parlementaire sur l'Algérie, en octobre 1955, Edgar Faure , président du Conseil, se prononce pour l'intégration, et, en décembre, André Morice , ministre de la Défense nationale, confirme « Il n'y a pas d'autre solution que celle de l'Algérie française. »

Cependant, les élections anticipées, imprudemment voulues par le chef du gouvernement, amènent à la Chambre une majorité sensiblement plus à gauche, et c'est Guy Mollet, secrétaire général de la SFIO, qui prend le pouvoir. Mal informé de l'état d'esprit qui règne outre-Méditerranée, il rappelle Soustelle, qui avait gagné les cœurs, et lui substitue le très « libéral » général Catroux , qui n'inspire aucune confiance à la bouillante population d'Algérie. Mollet débarque à Alger. Dans l'émeute, et sous les tomates, maladroit mais en somme patriote, il comprend sa faute, et remplace illico Catroux par Robert Lacoste , qui n'a rien d'un bradeur. Et qui, du reste, le manifeste sans retard :

« Les droits imprescriptibles de la France en Algérie ne comportent dans mon esprit aucune équivoque. »

Malgré cela, les partisans du général De Gaulle ne vont cesser de faire un procès d'intention au gouvernement. A leur tête, harceleur infatigable du pouvoir, le sénateur Michel Debré , qui use volontiers d'un langage à la fois emphatique et coruscant. Le 29 mai 1956, au Sénat, d'une voix de prophète biblique, il lance :

« Supposons la défaite française en Algérie, je veux dire que l'Algérie cesse d'être française, ce qui signifie qu'elle tombe dans l'orbite du panarabisme : le déferlement de ce mouvement racial est immédiat dans l'ensemble de l'Afrique, et ses conséquences, en Europe comme en Amérique, sont inimaginables... La perte de l'Algérie, ce serait la fin des principes fondamentaux qui font la gloire de la République française. La perte de l'Algérie, c'est la France communisée. »

L'année 1957 commence brutalement, à Alger, le 16 janvier, par un attentat dit improprement « du bazooka » contre le général Salan , commandant en chef qu'une sournoise propagande gaulliste présente comme un « liquidateur ». Or, dans le même moment, Debré promet « la guillotine à ceux qui, Algérie française. Du reste personne ne parle de le faire, du moins ouvertement ».

Toujours en, janvier, le nouveau ministre de la Défense nationale, Maurice Bourgès-Maunoury , se veut rassurant :

« Les résultats obtenus par l'armée permettent d'envisager avec confiance l'avenir de cette terre française. »

En juin et en juillet, c'est le président de la République lui-même, René Coty , qui prend, au nom de la nation, des engagements solennels :

« A nos compatriotes musulmans d'Algérie, je donne l'assurance solennelle que la France ne les abandonnera jamais. » Et encore : « Qu'on ne compte pas sur nous pour sacrifier, de l'autre côté de la Méditerranée, une nouvelle Alsace-Lorraine. »

Le 7 juillet, le colonel Bourgoin, héros de la Résistance, et Alexandre Sanguinetti vont déposer une gerbe au monument aux morts d'Alger, et prononcent alors la formule sacramentelle suivante :

« Deux millions d'anciens combattants de la métropole font par notre voix, en Algérie, terre française, le serment de s'opposer par tous les moyens à toutes mesures qui menaceraient l'intégrité du territoire et l'unité française. »

Du reste, au mois de décembre, le général Massu , qui vient de remporter un succès spectaculaire en gagnant la «bataille d'Alger », peut affirmer :

« Nous sommes en mesure de pouvoir étouffer la rébellion. Il faut qu'on sache que l'armée ne permettra plus aux intrigants de trahir la France. L'Algérie restera française, je vous l'assure. »

Pourtant, Debré ne se tient pas pour tranquille. Dans le journal qu'il dirige, Le Courrier de la Colère , il menace :

«L'abandon de la souveraineté française en Algérie est un acte illégitime, c'est-à-dire qu'il met ceux qui le commettent, et ceux qui s'en rendent complices, hors la loi, et ceux qui s'y opposent, quel que soit le moyen employé, en état de légitime défense. »

DEBRÉ DUR DE DUR.

En fait, cette inquiétude, même si elle adopte des accents messianiques, n'est pas sans puiser dans l'évolution des choses un certain fondement. Tandis qu'en Algérie la rébellion manifeste d'autant plus d'activité qu'elle trouve dans la Tunisie voisine un « sanctuaire »,complaisant où préparer ses raids et où se réfugier, l'aviation française, utilisant alors ce qu'elle considère comme une forme légitime du droit de suite, bombarde, le 8 février 1958 , le village tunisien de Sakiet-Sidi-Youssef , où cantonnent de nombreux fellaghas.

A Paris, le pouvoir donne des signes de flottement. Sujet aux pressions internationales, en proie à des difficultés financières multiples, harcelé par la conjonction des oppositions extrêmes, le gouvernement a certes fait voter, le 31 janvier , une loi-cadre dont le préambule spécifie que « l'Algérie est partie intégrante de la République française ».

Cependant, la conviction des responsables à ce propos semble s'affadir.

Or, le 9 mai, l'exécution, en Tunisie, de trois soldats français prisonniers du FLN fait, à Alger, déborder la coupe de l'angoisse et de la fureur. La foule se rue à l'assaut du gouvernement général.

Le général Salan , qui a télégraphié au général Ely , chef d'état-major général :

« L'armée française, d'une façon unanime, sentirait comme un outrage l'abandon de ce patrimoine national ».

Le général Salan donc, essaye ensuite de calmer la foule en lui lançant :

« La victoire, c'est la seule voie de la grandeur française. »

Échappant, dans des conditions un peu rocambolesques, aux sbires qui le surveillent, Soustelle réussit à gagner Alger, qui lui fait un accueil triomphal. Il électrise la foule, en s'écriant le 17 mai :

« L'intégration, maintenant, est un fait acquis. Vous ne faites qu'une seule famille, celle de l'Algérie française. »

Paris atermoie, parle de discipline républicaine, mais les militaires sont trop engagés pour revenir en arrière. Le 19 mai, le discret amiral Géli , préfet maritime d'Alger, se laisse aller à crier :

« Vive l'Algérie française, et vive la France ! ». Salan , le même jour, parle de ces « dix millions de Français, décidés à rester français, indissolublement liés à l'armée et à la République ».

« L'Algérie c'est la France. Qui hésiterait à employer tous les moyens pour préserver la France ? » demande un jeune ministre de l'intérieur, François Mitterrand , à la Toussaint 1954.

Pendant ce temps, De Gaulle , sorti de sa retraite de Colombey, commence à parler en maître. La classe politique, subjuguée, ne lui résiste pas longtemps. Le 19 mai, il « accepte » de former le gouvernement, après avoir reçu d'Alger un message de son gendre Alain de Boissieu :

« L'élan de fraternisation qui a rapproche les diverses communautés permet de reconsidérer complètement la question de l'avenir de l'Algérie. La solution de l'intégration, qui semblait avoir perdu toute sa valeur, revient à la surface avec une poignante sincérité.»

Sitôt investi, De Gaulle s'envole pour l'Algérie, où il est littéralement plébiscité par des marées humaines, auxquelles il tient un langage qui les comble de satisfaction. Peut-être, si elles en faisaient la froide exégèse, seraient-elles plus réticentes, mais le grand soleil et l'enthousiasme ne poussent pas à cet examen.

COMPRIS QUOI?

A Alger, d'abord, le 4 juin, c'est le célèbre : « Je vous ai compris », suivi notamment de cette formule, en apparence catégorique :

« A partir d'aujourd'hui, la France considère que dans toute l'Algérie il n'y a qu'une seule catégorie d'habitants ; il n'y a que des Français à part entière, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs. »

Puis, c'est une rapide tournée des principales villes, dont chacune a droit à son discours euphorisant.

Le 5 juin, à Bône
• « Venez à la France, elle ne vous trahira pas ». ;

A Oran

• « L'Algérie est organiquement une terre française, aujourd'hui et pour toujours ».

A Constantine, s'adressant surtout aux musulmans, le général leur promet que, dans les scrutins qu'il annonce,

• « leurs voix, leurs suffrages, pèseront aussi lourd que les suffrages de tous les autres Français »..

Enfin, le 6 juin, à Mostaganem, il prononce la formule magique, à laquelle tous les auditeurs attachent valeur de contrat :

« Vive Mostaganem ! Vive l'Algérie française »

Ainsi, tout parait aller enfin pour le mieux dans la meilleure des Algérie, et le 25 juin, André Malraux , qui a toujours aimé les synthèses grandiloquentes, prend acte

« Pour la première fois, en Islam, une révolution ne se fait pas contre l'Occident, mais en son nom, et l'on crie Algérie française, alors qu'on ne criait pas : Pakistan anglais »

Que l'intégration soit donc au programme, c'est ce qui semble d'ailleurs ressortir de la décision (inapplicable dans l'immédiat telle quelle, et qui demeurera sans application) que De Gaulle annonce le 3 octobre, en lançant le « Plan de Constantine », destiné à industrialiser l'Algérie, et qui, lui aussi, demeurera la virtualité d'un embryon :

« Pendant les cinq prochaines années, un dixième au moins des jeunes gens qui, en métropole, entreront dans les corps de l'Etat, les administrations, la magistrature, l'armée, l'enseignement, les services publics, seront pris obligatoirement dans l'une des communautés arabe, kabyle ou mozabite. »

Le 23 octobre, en une conférence de presse à grand spectacle, le chef du gouvernement récidive :

« A quelles hécatombes condamnerions-nous ce pays, si nous étions assez stupides et assez lâches pour l'abandonner ! »

Mais après cette affirmation, et sous la forme emphatique « moi De Gaulle », il déclare soudain qu'il propose aux gens du FLN « la paix des braves ».

Moins de deux mois après, Salan est rappelé, à Paris, sous le prétexte d'y occuper un poste superbe qui sera supprimé presque tout de suite, l'ensemble des pouvoirs qu'il détenait se trouvant répartis entre un civil, Paul Delouvrier, et un militaire, le général Maurice Challe.

Les plus avisés des Algériens commencent à pressentir que De Gaulle pourrait bien leur préparer, sans qu'ils discernent encore sous quelle forme, un autre avenir que celui par eux escompté.

De Gaulle qui, le 8 janvier 1959, a officiellement succédé à René Coty à la présidence de la République, laisse en tout cas le général Challe monter un plan destiné à venir à bout par la force de l'insurrection. Mais tout au long de l'année, ses propos vont lentement s'infléchir.

Un premier indice en apparaît lorsque, le 16 avril, il a estomaqué, le député, d'Algérie Laffont , par cette formule à la fois badine et menaçante :

« L'Algérie de papa est morte, et si on ne le comprend pas, on mourra avec elle. »

Mais comme, le 10 février précédent, Michel Debré , désormais Premier ministre, a encore répété :

« L'Algérie est terre de souveraineté française, ceux qui y vivent sont des citoyens français », le général Massu est dépourvu d'inquiétude, et, pour le, premier anniversaire du 13 mai, il souligne que cette date « marque l'engagement solennel que l'armée a pris de maintenir l'Algérie terre française, envers et contre tous ceux qui ont intérêt à la séparation ».

DOUCHES ÉCOSSAISES

Voici pourtant que surgit une notation bizarre, une sorte de ballon d'essai que De Gaulle fait lancer par Debré, qui, le 26 août, s'écartant notablement de toutes ses affirmations précédentes, donne tout à, coup dans l'ambigu . « Aucun Etat algérien n'est concevable à court terme, et il est également impossible d'assimiler l'Algérie à la France. »

Procédant par douches écossaises, De Gaulle, sitôt ces mots inquiétants jetés par son Premier ministre, et afin que, l'armée ne bronche point, entreprend dès le lendemain une « tournée des popotes », où, en petit comité, il explique aux officiers anxieux qu'ils auront tout lieu d'être satisfaits de lui.

Au retour, le 10 septembre, pour corroborer cette attitude, il n'y va pas par quatre chernins : « La guerre est terminée. Les gens du FLN seront ici, demain, après-demain, avant huit jours. Ils demanderont la paix à genoux ».

Une déclaration de M. BOURGES-MAUNOURY

"Il n'est pas question pour nous d'être mis à la porte et encore moins d'abandonner l'Algérie". « L’Echo d'Alger », 1er octobre 1956.

Une semaine ne va cependant pas se passer sans que, dans le ciel politique qui s'ennuage, la foudre éclate. Le 16 septembre, De Gaulle, devant un opulent parterre de journalistes conviés à l'Élysée, abandonnant toute référence à «l'appartenance organique de l'Algérie à la France », propose aux « Français à part entière » d'hier, trois solutions « à la carte » pour demain :

« Ou bien la sécession, où certains croient trouver l'indépendance. La France quitterait alors les Algériens qui exprimeraient la volonté de se séparer d'elle ;

- ou bien la francisation complète, telle qu'elle est impliquée dans l'égalité des droits

- ou bien le gouvernement des Algériens par les Algériens, appuyés par l'aide de la France, et en union étroite avec elle, pour l'économie, la défense, les relations extérieures. Dans ce cas, le régime intérieur de l'Algérie devrait être du type fédéral. »

Pour les partisans de l'Algérie française en général, et pour l'armée en particulier, le coup est rude. Ce choix offert, que son auteur baptise, d'un terme du reste improprement employé dans ce sens, « l'autodétermination », balaye en fait les grandes espérances.

Massu tente bien de faire contre mauvaise fortune bon cœur :

« La pacification continue, et continuera, avec les mêmes Moyens. L'autodétermination n'est qu'un mot, ici chargé d'orage, mais nécessaire pour l'étranger. »


Pauvre Massu ! Puisqu'il ne veut pas comprendre, on va lui tendre, un piège. Un journaliste allemand du nom de Kempski se charge de la vilaine besogne : lui en faire dire trop.

« Nous ne comprenons plus la politique du général De Gaulle, confie Massu. Moi-même, et la majorité des officiers, n'exécuterons pas - inconditionnellement les ordres du chef de l'Etat. »

Cela y est ! La provocation a réussi. Massu, qui a oublié son devoir de réserve, est rappelé. Son départ exaspère Alger. Entraînant les pieds-noirs les plus résolus, Joseph Ortiz et Pierre Lagaillarde s'enferment, armés, dans une enceinte de barricades. Malheureusement, une fusillade éclate.

Afin de calmer un jeu qui pourrait vite devenir dangereux, De Gaulle fait d'abord donner ses porte-parole. Le 28 janvier, Delouvrier et le général Gambiez vont au charbon.

« Allez-vous dire, lance le premier, que le chef de l'Etat veut brader l'Algérie ? Comment pouvez-vous le croire ? Dans les semaines à venir, l'Algérie sera librement et définitivement française. »

Et Gambiez :

« Jamais la France n'abandonnera l'Algérie. J'ai en la cause de l'Algérie française une foi inébranlable autant que raisonnée. »

Le lendemain, De Gaulle, ayant revêtu sa tenue de général de brigade , apparaît, jupitérien, à la télévision :

«Comment, pouvez-vous écouter les menteurs et les conspirateurs qui vous disent qu'en accordant le libre choix aux Algériens, la France et De Gaulle veulent se retirer de l'Algérie, et la livrer à la rébellion ? »

Comme il a toujours besoin que l'armée reste à sa main, le chef de l'Etat, en mars, effectue une seconde tournée popotes, au cours de laquelle il explique aux officiers :

« L'indépendance, c'est la misère, la clochardisation, la catastrophe. La francisation ? Les musulmans, qui ne se lèvent même pas quand passe le président de la République française, ne seront jamais des Provençaux ni des Bretons. Je crois qu'ils diront : une Algérie algérienne liée à la France. »

Beaucoup d'officiers traduisent « je crois qu'ils diront » par « je veux qu'ils disent ».

UN COEUR TRANQUILLE

Cependant, patiemment, habilement, De Gaulle enfonce son clou. Le 14 juin :

« On ne conteste plus nulle part que l'autodétermination des Algériens quant à leur destin soit la seule issue possible de ce drame complexe et douloureux. »

Le 5 septembre, encore en conférence de presse :

« La seule question qui se pose est de savoir si cette Algérie sera algérienne contre la France, ou en association avec elle. »

Ainsi, mi-subrepticement, mi-ouvertement, on est bien passé cette fois de l'Algérie française à l'Algérie algérienne. Et comme des pourparlers ont commencé avec ce que De Gaulle avait surnommé « l'organisation extérieure de la rébellion », il fait monter les enchères : « Les insurgés voudraient que nous leur passions la main. Cela, je ne le ferai jamais. »

Mais c'est encore une façon, le 4 novembre, d'avancer un pion :

« Les dirigeants rebelles se disent être le gouvernement de la République algérienne, laquelle. existera un jour, mais n'a encore jamais existé. »

Le 8 janvier 1961, un référendum approuve massivement l'autodétermination.

Challe démissionne. Quant à De Gaulle, parodiant, peut-être involontairement , Emile Ollivier , il déclare le 11 avril :

« J'envisage l'indépendance de l'Algérie avec le plus grand sang-froid et un coeur parfaitement tranquille. »


Cette fois, c'en est trop pour de nombreux militaires qui, d'une part, ont fait et continuent de faire tuer les hommes, et, qui, d'autre part, ont, sur ordre, juré personnellement aux populations qu'ils ne les abandonneraient jamais.

Le 22 avril, les généraux Challe, Jouhaud, Zeller, que Salan rejoindra le lendemain, s'emparent des leviers de commande avec le concours des parachutistes de la Légion. Challe proclame :

« Un gouvernement d'abandon nous apprenait successivement : l'Algérie française, l'Algérie dans la France, l'Algérie algérienne, l'Algérie indépendante associée à la France. Il s'apprête aujourd'hui à livrer définitivement l'Algérie à l'organisation extérieure de la rébellion. »

Oubliant ses diatribes enflammées de naguère Debré monte au créneau le jour même :

« La nation fait confiance au général De Gaulle sur la voie de la paix et de l'association de la France avec une Algérie nouvelle. »

De Gaulle, lui, attend le lendemain pour prendre les choses de son haut :

« Les coupables de l'usurpation ont exploité la passion des cadres de certaines unités spécialisées, l'adhésion enflammée d'une partie de la population de souche européenne, qu'égarent les craintes et les mythes, l'impuissance des responsables submergés par la conjuration militaire. »

A quoi Challe réplique, le lendemain :

« Grâce à l'armée française, nous garderons le sol de la patrie, afin que l'Algérie nouvelle naisse dans l'union des communautés. »

Mais c'est le dernier sursaut. Les quatre généraux que De Gaulle, prenant des libertés avec la sémantique, a qualifiés de « quarteron » (ce qui, en réalité, veut dire : vingt-cinq se séparent). Challe et Zeller se rendent. Salan et Jouhaud tentent de continuer dans la clandestinité une lutte qui ne peut plus soutenir beaucoup d'espoir.

Les remous n'y feront plus rien, ni les attentats de l'OAS. De Gaulle a mené les choses où il voulait . En juillet 1962, l’œuvre de Bugeaud, de Mgr Lavigerie, de Laperrine, du père de Foucauld, aura disparu dans les ténèbres extérieures de l'Histoire.

La brève chrestomathie que nous venons d'évoquer garde une valeur sombrement documentaire. Elle fournit un exemple à la fois stupéfiant et décourageant de ce que peut le verbe.

D'abord enthousiasmée par le slogan « Algérie française », la France métropolitaine s'est bien vite accoutumée à la formule redondante d'« Algérie algérienne », et n'a plus tressailli lorsqu'après avoir franchi cette transition, on lui a présenté l'« Algérie indépendante ».
C'est encore plus court que dans l'invocation de Victor Hugo à propos de Napoléon. Ici, quatre ans ont suffi pour filer le suaire d'une grande espérance et de tous ceux qui moururent pour elle.

COMMENTAIRE DE Sivéra

Avant même d'avoir ouvert les archives de cette triste époque, avec pour dirigeants de bien "TRISTES SIRES", beaucoup de nous auront compris les raisons pour lesquelles cette période est volontairement occultée ! Pour le reste, les amnésiques, les aveugles, les sourds, les muets devant tant de HONTE, ils sont irrécupérables. Comment osent-ils encore se regarder dans la Glace !



 
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