Les autorités judiciaires ont ainsi fait droit à la requête de l'avocat de Fabienne Burgeat-Boulin , Me Jean-Marc Fédida . Celui-ci avait notamment attiré l'attention du parquet sur les témoignages recueillis par l'équipe qui avait proposé à Canal + un documentaire sur la fin tragique de cette personnalité gaulliste, restée très proche de Valéry Giscard d'Estaing dans un contexte de majorité divisée.

Les doutes du médecin légiste.

Les téléspectateurs ayant vu le film de Canal+ n'ont pu manquer d'être troublés par certaines déclarations, notamment celle du docteur Juliette Garat , médecin légiste en retraite. Cette spécialiste a étudié avec soin les radiographies de la face du défunt, concluant à l'existence de fractures inexplicables par une simple chute dans l'étang où le corps a été retrouvé. Selon elle, des coups ont été portés au « suicidé » . L'experte fera bien entendu partie des personnes interrogées par la justice car la question de l'autopsie est au coeur du mystère. Les praticiens commis à l'époque avaient déjà confié les raisons -au point même, pour l'un d'entre eux, d'écrire un livre - les ayant amené à conclure au suicide. Sans parvenir cependant à dissiper des doutes sur les circonstances immédiates de l'enquête après la découverte du corps: aucune analyse de l'eau des poumons n'a eu lieu - une anomalie que l'on retrouvera d'ailleurs dans l'affaire Grégory - certains organes prélevés sur le corps n'ont pas été conservés et, enfin, des procès-verbaux ont été grossièrement surchargés.

Après la diffusion du documentaire, cependant, de bons connaisseurs du dossier mirent en garde la famille et le public sur les illusions susceptibles de naître autour d'une nouvelle enquête. Quelques articles parurent, incitant à ne plus chercher de mystère autour d'un suicide d'autant plus évident qu'il s'est accompagné d'une lettre-testament expédiée à plusieurs organes de presse, dont « Sud-Ouest ». Menacé de voir le bel édifice de sa carrière s'effondrer du fait des magouilles immobilières d'un « ami » Henri Tournet , l'ayant compromis dans une histoire de terrains à Ramatuelle, le ministre aurait choisi de se donner la mort pour ne pas affronter le scandale. Une tragédie Bérégovoy avant la lettre, en somme...

Cette version à toujours paru curieuse, cependant, à ceux qui connaissaient bien Robert Boulin. Affecté et rendu irritable par les révélations concernant Ramatuelle, il avait plutôt donné à ses proches le sentiment d'avoir envie de ferrailler, notamment avec le jeune juge qui avait découvert le pot aux roses au détour d'un dossier notarial instruit à Caen. Ce magistrat alors en début de carrière s'appelait - et se nomme toujours - Renaud Van Ruymbeke et il a conquis une renommée certaine en s'attaquant aux « pompes à finances » du PS avant de remplacer Eva Joly dans les méandres du dossier Elf.

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