Il y a
40 ans la Guerre d’Algérie commençait
Archives MINUTE N° 1697 du 26 octobre 1994
Recueilli par Sivéra
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JOUHAUD témoigne :
« Les méthodes qui ont permis au FLN de s’imposer se retournent
aujourd’hui contre lui »
A l'occasion de l'anniversaire de la Toussaint
sanglante, le général Edmond Jouhaud, Pied-Noir et dernier survivant des
quatre généraux du putsch de 1961, raconte…
Le général Edmond Jouhaud est né en 1905, à vingt kilomètres
d'Oran, dans une famille d'instituteurs dont les ancêtres étaient installés
en Algérie depuis 1848. Dernier survivant des quatre généraux du
putsch du 22 avril 1961, il aura 90 ans dans quatre mois. Il n'était pas en
Algérie lors de la Toussaint sanglante de 1954, mais il se souvient.
« Minute »
: Mon général, la rébellion algérienne était-elle, selon vous, inéluctable
?
Général Jouhaud :
En novembre 1954, je commandais en Indochine les forces aériennes d'Extrême-Orient.
J'ai été vivement frappé par la similitude du massacre en Algérie et des méthodes
de la guérilla indochinoise, dont je connaissais le redoutable potentiel de
terreur. J'ai conçu alors une grande inquiétude pour l'Algérie, où j'avais
mes amis et mes racines familiales. Pourtant, pas plus qu'en 1945, on ne
pouvait attribuer ces événements à une quelconque rancœur des musulmans.
Il existait des problèmes économiques nés du départ des agriculteurs
partis libérer la métropole et du manque de matières premières imputable
à la guerre. Ensuite, les gouvernements se succédaient, sans aucune ligne
politique cohérente pour l'Algérie.
Après tous ces sacrifices on pouvait parler d'une Algérie prospère et
pacifiée
Nous n'avions pourtant pas à rougir de notre oeuvre. La présence française
a succédé à l’occupation turque qui était cruelle et sanglante. La
France a mis fin à ce régime et, s'est mise au travail, asséchant les
marais, créant 21 ports, des ponts, des routes, dès voies ferrées, des hôpitaux
et des écoles, dans des conditions d'insalubrité telles qu'on a pu écrire,
en 1848, que les seules colonies florissantes en Algérie étaient les cimetières.
Après tous ces sacrifices, vers 1870, on pouvait parler d'un pays prospère,
où., de simples opérations de police suffisent désormais à maintenir
l'ordre républicain.
Malgré toute la situation est restée critique jusqu’en 1954, à cause
des décisions sans lendemain de gouvernements incapables de juguler dans l'œuf,
ce qui n'était qu'une révolte concentrée dans les Aurès, mais qui allait
devenir une guérilla menaçant tout le pays. L'existence tolérée par Paris
de « sanctuaires » tunisiens et, à un degré moindre, marocains allait
assurer l'impunité aux chefs de la rébellion. L'extrême cruauté de leurs méthodes
allait pousser à la complicité passive, puis active, une partie de la
population.
Quelles réflexions vous inspire la guerre civile
qui ensanglante à nouveau, aujourd'hui, l'Algérie ?
Dès 1958, après la bataille d'Alger, l'armée avait gagné sur le terrain
et reconquis les cœurs, comme le prouvait l'adhésion massive de la
population musulmane lors des événements du 13 mai. Seule, une trahison
sans précédent dans notre histoire, livrant une terre française à
l'influence du bloc soviétique, permettait de conclure les accords d'Evian
par la perte de nos trois départements d'Algérie.
Ce rappel était nécessaire pour comprendre ce qui se passe. aujourd'hui:
c'est de ces prétendus « accords » d'Evian que découle le profond
malaise qui ouvre, en Algérie, le champ à l'islamisme. Les « négociateurs
» du FLN, vaincus sur le terrain, vaincus dans
l'opinion musulmane, mais pourtant désignés, hors de tout processus démocratique,
comme seuls représentants de l'opinion algérienne à Evian, ne représentaient
pas le peuple d'Algérie!
Faut-il rappeler que le seul qui ait signé à Evian, Belkacem Krim,
n'était même pas reconnu par le FLN de Tunisie, qui n'était d'ailleurs
qu'une faction du FLN parmi tant d'autres...
La République concoctée à Evian est aujourd'hui sur le point de disparaître
dans un bain de sang , elle n'a donc jamais été que l'émanation de
factions successives du FLN. Par ailleurs, au Maroc et en Tunisie ' (bien qu'à
des degrés différents), l'administration française était doublée d'une
administration locale, participant et se formant au service de I'Etat. Rien de
semblable, en Algérie : les chefs FLN n'avaient ni le sens de l'Etat ni la
notion de service public : ils ne représentaient guère que leurs intérêts
et ceux de leurs coteries respectives, courant après les prébendes, les
voitures officielles et les trafics en tout genre.
Comment voyez-vous l'avenir ?
Les méthodes qui ont permis hier au FLN de s’imposer se retournent
aujourd'hui contre lui : on pose des bombes et on brûle à nouveau des écoles
en Algérie, comme dans les années soixante. On enlève, on rançonne
et on assassine... Cette situation et celle, encore plus terrible, que
je redoute pour bientôt - m'émeut profondément : malgré trente années écoulées
et malgré mes 90 ans, je reste profondément fidèle à l'Algérie que j'ai
connue et à l'estime que nous nous portions mutuellement, musulmans et pieds-noirs,
contrairement aux mensonges du général de Gaulle, répétés récemment
par Alain Peyrefitte.
« L'Algérie des accords d'Evian est aujourd'hui sur le point de disparaître
dans un bain de sang »
Lorsque se déclenchera cette révolution
islamique
, la catastrophe sera sans précédent pour l’ensemble des pays méditerranéens
limitrophes : l’Espagne, l'Italie et surtout la France.
Une immigration massive, apportant malheur et chômage, fera une réalité
de l’apocalypse du « Camp des saints » imaginée par jean
Raspail.
propos recueillis par Jean-Paul LE PERLIER
A méditer
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